J'étouffa un soupire en passant la main sur ma nuque. Je roulais depuis un temps incalculable et j'avais drôlement hâte d'arriver dans cette fichue école. Déprimé par les idioties qui jouaient à la radio depuis la matinée, je m'étais résigné à passer ce long voyage dans le silence le plus complet. Une fois de plus, je me maudis d'avoir oublié mon Ipod au fin fond da ma valise, que je n'avais absolument pas envie d'aller chercher. C'est donc influencé par la plus noire des mélancolies que je roulais sur cette route déserte qui devait m'amener jusqu'a l'objet de ma convoitise, soit la fameuse école d'art Barychnikov. J'avais été joyeusement étonné d'avoir été accepté dans une école aussi prestigieuse pour mes talents de dessin. Comme quoi je pouvais ainsi prouver à mes parents qu'ils se trompaient et que je pouvais réussir ma vie en faisant ce que j'aimais.
Le soleil commençait à décliner, l'astre étendait paresseusement ses rayons le long de la côte, léchant la mer et glissant sur le sable de la plage. Je du m'empêcher d'arrêter le moteur afin de sortir mon calepin et reproduire ce magnifique coucher de soleil. Je roulais sur le bord de l'océan depuis un bon moment, et je n'arrivais pas à croire qu'il n'y avait strictement personne. Certes, le soleil perdait en autorité, cédant doucement la place à sa complice lunaire, mais le temps était encore sublime, et personne n'était venu en profiter. Incapable d’endurer cette tentation plus longtemps, je finis par ralentir, jusqu'a me garer sur le côté de la route. Je restai un moment silencieux, pianotant distraitement sur mon volant. Bon, si je sortait maintenant, je n’arriverais probablement pas à me décoller du paysage avant la tombé de la nuit. Et au téléphone, j'avais dit à Érik que j'arriverai avant souper... Il me restait encore 30 minutes de route, arriverais-je a temps?
Je conclus finalement la question en étouffant un juron et en ouvrant ma portière. Je me pencha vers l'arrière de la voiture, saisit mon carnet à dessin ainsi que quelque crayons puis sortit en emportant ma veste de cuir. Rester tard au bord de la mer me laisserait probablement frigorifié, alors autant amener une certaine dose de protection. Je doutais fortement que mon Jeans délavé et mon T-shirt noir ne soit suffisamment chaud pour l'air glacial de cette fin de soirée. Je verrouilla les portes, puis descendit vers la plage. Après quelques minutes de marche à peines, j'abandonna mes runnings et mes bas afin de sentir mes orteils s'enfoncer dans le sable encore étonnement tiède. J'avança vers l'océan, les yeux emplis de tendresse pour le doux mouvement des vagues, ensorcelé par leur magnétisme. Dès que mes pieds entrèrent en contact avec l'eau froide, je frissonna. Malgré la température inhumaine, je m'enfonça jusqu'aux chevilles, et marcha longuement ainsi, les mains dans les poches.
L'heure du souper était passée depuis un moment lorsque je revins vers ma voiture, l’esprit reposé. Même si j’étais revenu au point d’abandon de mes souliers, je m’assis par terre et sortit mon carnet de ma poche. Je l’ouvris à une page vierge et attrapa un crayon à mine épaisse. J’avais eu la présence d’esprit de m’assoir près d’une énorme pierre, et je pu m’y adossé sans problème. Confortablement installé, je m’attaqua à mon dessin, traçant rapidement les trait d’un phare au bord de l’eau. Tout à coup, j’entendis le bruit des pas étouffé par le sable. Je releva la tête, la main devant les yeux afin de les protéger du soleil. Une ombre émergea de la lumière…